ÉDITO: « L’abolition passe (aussi) par l’éducation ! »


25 novembre 2019

Par Laure Boukabza, Responsable du programme Éduquer d'ECPM

 

« Les jeunes sont les citoyens d’aujourd’hui et électeurs de demain. C’est avec cette réalité en tête que le pôle Éduquer d’ECPM part à la rencontre de collégiens et lycéens dans toute la France, mais pas seulement.

La création du Réseau International d’Education à l’Abolition, qui regroupe une dizaine de pays à l’heure actuelle, participe à la construction d’une citoyenneté mondiale, au sentiment d’appartenance à une génération qui sera moteur de changement.

Laure Boukabza © Adèle Martignon

Pourquoi parler de peine de mort à des adolescents français, vous demandez-vous ?

D’abord pour animer le devoir de mémoire qui nous incombe à tous. L’abolition de la peine de mort en France a été le fruit de dizaines, de centaines d’années de lutte, dont il nous faut garder une trace. Ensuite, parce que la peine capitale est une réalité pour plus d’un jeune sur deux dans le monde*.

Nous nous adressons à une classe d’âge pour laquelle la distinction entre justice et vengeance est parfois difficile à entrevoir, à une génération qui tutoie la violence quotidiennement dans les films, les jeux vidéo, sur les réseaux sociaux, etc, mais qui n’a pas, en France, vécu la guerre, la lutte pour l’abolition ou pour beaucoup de droits fondamentaux dont nous pouvons nous enorgueillir aujourd’hui. De nombreuses thématiques transversales peuvent être abordées au travers de champs disciplinaires variés (histoire, droit, philosophie, sociologie…) pour tenter d’appréhender la réalité d’une mise à mort légale et programmée.

La société de l’instantané dans laquelle grandissent nos jeunes ne laisse pas de place au recul, à la seconde chance,  au pardon. Le jugement est constant et omniprésent sans pour autant être construit. Il détruit le vivre ensemble et affaiblit  les valeurs de la République.

Nous plaidons donc pour une abolition universelle de la peine de mort, et plus largement pour le respect des droits de l’homme et de sa dignité.  

Mais réjouissons-nous ! La jeunesse est une force en cela qu’elle a la capacité de s’extraire de modèles et réflexions préconçues.  Questionner, s’indigner, se mobiliser est primordial  dans un cycle de changement et l’ancrage d’idées abolitionnistes à l’échelle individuelle peut faire basculer l’opinion collective à court ou moyen terme.

Si nous touchons toutes sortes de publics (jeunes sous protection de la PJJ, services civiques…), nos interventions ont traditionnellement lieu dans le cadre de l’éducation formelle et s’inscrivent directement dans les programmes scolaires du collège et du lycée. Il s’agit d’aborder l’histoire de l’abolition en France, de dresser un bilan de la situation à l’échelle mondiale, les éléments principaux de l’argumentaire abolitionniste, d’amener les jeunes à débattre entre eux de leurs idées et ce qui les motivent. Dans la mesure du possible cette partie théorique est suivie du témoignage d’un « témoin » de l’abolition, ancien.ne.s condamné.e.s, familles de condamné.e.s, expert.e.s sur le sujet… Cela permet de mettre un « visage » sur un concept parfois flou et lointain.  

D’autres activités et outils « clefs en main » viennent compléter le kit pédagogique d’ECPM et permettent aux enseignants et éducateurs de se saisir de cette thématique riche, à leur rythme et convenance.

L’équipe Éduquer se tient à leur disposition pour co-construire événements et interventions, comme ce sera d’ailleurs le cas à Essaouira (Maroc) et Tunis (Tunisie) début décembre ! »

 

 

*Selon les chiffres du Rapport sur la peine de mort 2018 d'Amnesty International