Édito : non, la peine de mort n’appartient pas encore au passé
29 avril 2013
Rendez-vous à Madrid du 12 au 15 juin
La présentation de l’état des lieux de la peine capitale dans le monde en 2012*, qui vient de paraitre en avril, en mettant l’accent sur la diminution du nombre de condamnations à mort et de pays pratiquant des exécutions, est tendancieuse car elle pourrait nous laisser croire que le monde rangera bientôt, sans résistance, garrots, injections létales et autres pelotons d’exécutions au musée des horreurs de l’humanité.
Dans la réalité, il n’en est rien.
S’il est indéniable que l’abolition de la peine de mort progresse, isolant chaque année un peu plus les pays pratiquant ce châtiment, notre « I have a dream » commun est loin d’être atteint.
En avançant, le front abolitionniste se heurte aujourd’hui à des lignes de résistances de plus en plus difficiles à briser, comme sourdes à la voix internationale. De l’Asie aux États-Unis en passant par le monde arabe, s'opposent toujours des arguments culturels, historiques et liés à l’opinion publique aux arguments universels ; la réaffirmation que la peine de mort est une question de souveraineté nationale et non de droit international.
Une illustration ? Le camouflet reçu il y a quelques jours par la communauté internationale présente à Taïwan, qui après avoir reçu des assurances au plus haut niveau de l’État sur la réduction des exécutions, a appris avec stupéfaction l’exécution, deux jours après son départ, de 6 condamnés! Nous y étions (photo : Raphaël Chenuil-Hazan (à dr.), directeur d'ECPM, remet un courrier de la Coalition mondiale contre la peine de mort à l'ambassadeur taïwanais chargé des ONG, Rong-chuan Wu) et nous réagissons.
Aujourd’hui, environ 60 % de la population mondiale vit toujours dans un pays qui maintient la peine de mort. Dans le monde, en 2012, les exécutions ont repris et ce quelle que soit la durée du moratoire : après 30 ans en Gambie, après 9 ans en Inde. Dans le monde en 2012, les attardés mentaux sont toujours exécutés aux États-Unis, les mineurs en Iran, au Yémen, au Soudan et en Arabie Saoudite.
Dans le monde, en 2012, la question est toujours délicate pour les populations comme l’illustre un tout premier sondage en Tunisie affirmant que 70 % des tunisiens sont opposés à l’abolition et ceci malgré 20 années de moratoire sur les exécutions dans le pays.
Dans le monde, en 2013 et après, ce n’est que l’effort concerté des acteurs abolitionnistes qui permettra de faire bouger les lignes. Alors ne faiblissons pas, mais autorisons-nous à rêver aussi un peu.
« Dessine moi l’abolition », avons-nous proposé à nos chères têtes blondes et brunes des collèges et lycées de France et d’Espagne. Montrez-nous, de la pointe de vos crayons ou des touches de vos claviers, notre rêve commun. Point de moutons, mais des envolées de colombes libérant les cordes, des corbeilles pour jeter définitivement la peine capitale aux ordures. Des mots, beaucoup… Des regards, différents. Admirons ici la poésie et la créativité des petits princes de l’abolition.
Continuons à aller de l’avant, à agir, travailler, observer, et rendez-vous à Madrid, du 12 au 15 juin pour le 5e Congrès mondial contre la peine de mort… Inscrivez-vous ici !
Ariane Grésillon
Directrice adjointe d’ECPM
* http://www.amnesty.org/fr/death-penalty/death-sentences-and-executions-in-2012