Les enfants de parents condamnés à morts ou exécutés: thématique phare de la 17e Journée mondiale contre la peine de mort


20 novembre 2019

Souvent oubliés, les enfants de parents condamnés à mort ou exécutés portent un lourd fardeau émotionnel et psychologique qui peut fortement porter atteinte à leurs droits. En lien avec le 30ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989, la Journée mondiale contre la peine de mort, qui se tient chaque 10 octobre, se concentre cette année sur les enfants et leurs droits.

Le thème... « Les enfants : victimes invisibles de la peine de mort »

Le traumatisme connu par ces enfants peut survenir à toutes les étapes de la condamnation à mort d’un parent : arrestation, jugement, condamnation, couloir de la mort, date d’exécution, exécution et ses conséquences. À chacune de ces étapes, l’enfant est pris dans des cycles permanents d’espoir et de désespoir qui peuvent avoir un impact à très long-terme, même à l'âge adulte. La stigmatisation par le groupe ou la société à laquelle il ou elle appartient et la perte d’un parent des mains de l’État rendent sa vie quotidienne particulièrement instable.

Je suis triste de ne plus pouvoir partager ne serait-ce qu’un repas avec lui.

Rehema Namulemo, Ouganda
Extrait du recueil "Paroles d'enfants"

Une thématique abordée lors du 7e Congrès mondial contre la peine de mort

Comment le mouvement abolitionniste peut-il s'emparer de la double problématique du droit à la vie et du droit des enfants ? Cette réflexion a été conduite préalablement lors du Congrès mondial de Bruxelles. La Coalition mondiale contre la peine de mort, partenaire d'ECPM dans l'organisation du 7e Congrès, revenait dans un article sur le débat « Enfants de parents condamnés à mort ou exécutés: protéger leurs droits et limiter l’usage de la peine de mort », organisé par le Bureau Quaker auprès des Nations unies au Palais d'Egmont de Bruxelles le 26 février.

La peine de mort ne condamne jamais qu’un individu

Animée par un lourd désir de vengeance, la peine de mort affecte profondément la vie de l’entourage proche de la personne condamnée, sa famille et en premier lieux les enfants. Telle était la conclusion de l’atelier sur les personnes condamnées à mort et leur famille et de la soirée des témoins du 7e Congrès mondial.

Innocents et pourtant condamnés à payer un lourd tribut au nom de leur seule filiation, les enfants de condamnés à mort voient leur vie basculer. Sabine Atlaoui, dont l’époux Serge Atlaoui attend actuellement dans le couloir de la mort en Indonésie, a livré un témoignage poignant. Leur fils, né pendant la détention de Serge Atlaoui, fait face aux interrogations de ses camarades de classe en France et aux messages de propagande diffusés en Indonésie à l’encontre de son père.

 

Menacés, stigmatisés et discriminés, les enfants sont exclus du reste de la société et leurs droits fondamentaux sont bafoués.

 

Hedad Bentaoui et ses enfants ont fui l’Arabie Saoudite où Raef Bentoui a été condamné pour avoir, selon le régime, commis un crime d’apostasie. Installés au Canada, les enfants de Hedad n’ont qu’une information parcellaire à propos de leur père, dont la peine a été commuée en une peine de prison et 1000 coups de fouet, assortie d’une interdiction de quitter le territoire pendant dix ans.

La condamnation d’un parent, l’attente et les représailles à l’encontre de leur famille, et parfois le secret qui entoure l’exécution et le lieu d’inhumation, constituent une véritable torture qui nie leur droit à la santé et à être protégé de toute violence mentale. Leur droit à l’éducation n’est souvent pas respecté alors que son exercice est nécessaire pour la jouissance de tous les autres.

Agir pour les droits de tous les enfants

Le Comité des droits de l’Homme ou le Comité des droits de l’enfant encouragent les derniers États rétentionnistes à faire un usage plus limité de la peine de mort, qui tienne notamment compte de ses effets sur les enfants. Au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant, que consacre non seulement la Convention internationale des droits de l’enfant ainsi que les conclusions rendues par diverses institutions internationales et régionales des droits de l’Homme, des réformes majeures apparaissent comme nécessaires.

Depuis des années, le Bureau Quaker auprès des Nations unies, présent au Congrès mondial, œuvre pour la promotion des droits des enfants. Leur dernier rapport « Protection of the Rights of Children of Parents Sentenced to Death or Executed: An Expert Legal Analysis » offre une analyse de haut niveau du droit des enfants dans le droit international des droits humains. Et rappelle qu’au-delà d’une atteinte à leur droit, la peine de mort compromet leur bien-être. Leur précédent rapport, intitulé « Enfants de parents condamnés ou exécutés » explore les pistes de travail. Au-delà de maintenir les appels à l’abolition universelle et sans condition de la peine de mort, il est par exemple crucial de mieux former les personnels pénitentiaires, de travailler avec le corps enseignant et de doter les services sociaux de moyens qui leur permettent de prendre en charge les enfants.

Ma mère accoucha dans la prison Adelabab où j’ai passé les deux premières années de ma vie. En 1988, ma mère fut exécutée durant une vague d’exécutions de masse des prisonniers politiques qui dura presque 5 mois. 

Homan Mousavi (Iran)
Extrait du recueil "Paroles d'enfants"

  • L'Iran continue de condamner à mort et d'exécuter des mineurs, en violation du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention relative aux droits de l'enfant. On estime qu'au moins 85 enfants sont actuellement dans le couloir de la mort en Iran, bien qu'un amendement de 2013 à l'article 91 du Code pénal autorise les juges à exclure les enfants de la peine de mort.
  • L'Iran a exécuté sept enfants l'année dernière (2018) et deux depuis le début de l'année (2019), alors que la loi sur les droits humains interdit la peine de mort pour toute personne de moins de 18 ans.
  • Dans le monde, des mineurs sont encore condamnés et exécutés en Arabie saoudite (au moins 4 exécutions en 2018), au Pakistan (en 2017, des ONG estimaient que 10% de la population dans les couloirs de la mort étaient des personnes qui avaient commis un crime avant 18 ans) et au Soudan du Sud (au moins un mineur exécuté en 2018 et au moins un autre sous le coup d’une condamnation à mort), selon le Rapport d’Amnesty International 2018.

Le 10 octobre... De nombreuses actions en France et à l'international

Une journée d'actions à travers le monde pour innover ensemble

A l’échelle internationale, nationale ou locale, ECPM et ses partenaires sont mobilisés le 10 octobre à travers différentes activités. Indonésie, République démocratique du Congo, Maroc, Tunisie, Algérie, Paris, bien sûr, mais aussi Strasbourg...

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