La Malaisie ouvre la voie de l’abolition en Asie du Sud Est !


14 novembre 2018

LE MOT DE… Marie-Lina Samuel, Coordinatrice projet Afrique-Asie d’ECPM

« Rien ne semble pouvoir arrêter la marche vers l’abolition malaisienne ! Après l’avoir clamée lors du séminaire parlementaire régional (organisé par ECPM, ADPAN et PGA les 30 et 31 octobre 2018 à Kuala Lumpur), la Malaisie vient d’asseoir sa position sur la scène internationale : en votant en faveur de la résolution moratoire sur l’application de la peine de mort en troisième Commission à l’ONU le 13 novembre, elle insuffle un vent nouveau sur le continent asiatique. Jusqu’à présent, la Malaisie votait systématiquement contre cette résolution. Un revirement de situation très encourageant pour l’un des pays les plus sévères en matière de peine de mort (4 exécutions en 2017, 1260 condamnés à mort en 2018) et qui, surtout, se trouve dans une zone géographique où la dynamique avait bien besoin d’être inversée. Chez ses voisins Singapour et l’Indonésie, les condamnations à mort ne faiblissent pas ; le Bangladesh veut renforcer ses lois sur le trafic de drogue ; le Sri Lanka menace de reprendre les exécutions après des années de moratoire ; et les Philippines songent même à réinstaurer la peine de mort. Si la machine est lancée en Malaisie, la voie vers l’abolition n’est pas sans embûche. À l’intérieur, le gouvernement malaisien se confronte à une opinion publique peu favorable et à un Sénat plus conservateur, qui mettront des bâtons dans les roues des abolitionnistes. Mais le pays est influent, et d’autant plus susceptible d’inspirer ses voisins qu’il partage avec eux ses valeurs musulmanes et conservatrices. Le 30 novembre 2017, la Malaisie avait timidement aboli la peine de mort automatique pour trafic de drogue. Si elle décidait aujourd’hui de l’abolir totalement, elle deviendrait leader de sa région. Reste à savoir quelle stratégie sera adoptée : une abolition par étape, lentement mais sûrement, ou une abolition totale et rapide.

Il importe que les acteurs abolitionnistes de la société civile nationale et internationale, ainsi que les diplomaties, ne laissent pas la discussion retomber.

ECPM travaille à renforcer et soutenir l’action les différentes parties prenantes abolitionnistes, telles que l’institution nationale des droits de l’homme SUHAKAM, les acteurs de la société civile malaisienne, notamment ADPAN, le réseau abolitionniste pour l’Asie du Sud Est, dont le siège se trouve à Kuala Lumpur, ainsi que le travail mené par les parlementaires œuvrant pour l’abolition. Prochaine étape : la Malaisie devra confirmer son vote en faveur de la résolution moratoire sur l’application de la peine de mort lors de l’Assemblée Générale de l’ONU, mi-décembre. Avec elle, ils sont 8 pays de plus qu’il y a deux ans à se placer en faveur d’un moratoire universel contre la peine de mort. Le travail des abolitionnistes porte ses fruits ! »