N’oublions pas Hank Skinner ! – Interview avec Sandrine Ageorges-Skinner


4 avril 2019

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Le 4 avril, Hank Skinner a eu 57 ans. Il a passé les 24 dernières années dans les couloirs de la mort du Texas pour un crime qu'il n'a pas commis.

Le couloir de la mort est un lieu solitaire et désespérant, un « enfer » comme l’appelle Hank. Dans le couloir de la mort depuis 1995 et à l’isolement carcéral depuis juin 1999, le courrier est une source d’espoir et de force formidable pour lui. A l'occasion de son anniversaire, mais aussi pour le soutenir dans son quotidien, nous vous encourageons donc à lui écrire un petit motMerci pour lui.

> Les démarches pour contacter Hank Skinner <

 

Retrouvez ci-dessous l'interview de son épouse, Sandrine Ageorges-Skinner, qui fait le point sur la situation actuelle et les combats qu'il reste à mener.

Interview avec Sandrine Ageorges-Skinner, épouse d'Hank Skinner

Sandrine, vous avez rendu visite à votre époux pour son anniversaire : comment se porte-t-il ?

Il se porte comme quelqu’un qui a été arrêté il y a plus de 25 ans et qui est dans le couloir de la mort depuis plus de 24 ans pour un crime qu’il n’a pas commis. Il se bat et n’abandonne jamais, je le trouve incroyablement combatif, et sa force de vie m’épate toujours autant.

Bien sûr, la survie dans le couloir de la mort est épuisante, surtout depuis ses graves problèmes de santé en 2013.

Il lui faut absolument maintenir un régime alimentaire équilibré, qui n’est évidemment pas la préoccupation l’administration pénitentiaire. Après une période plutôt calme, malheureusement depuis l’arrivée d’un nouveau directeur à la prison, le quotidien est à nouveau inutilement compliqué et usant, ce qui rend le combat d’autant plus fatiguant et stressant.

Je dirais qu’il va plutôt bien étant donné les circonstances, même si cette année, il a vu plusieurs de ses amis exécutés et c’est pour lui le traumatisme le plus difficile à gérer. Le défi est quotidien, nous l’affrontons ensemble depuis plus de vingt ans, et nous n’abandonnerons rien face à l’injustice qu’il endure ou face à la peine de mort.

 

Quelles sont les prochaines étapes dans la lutte que vous menez pour libérer Hank ?

Depuis environ un an, son dossier et sa vie sont de nouveau entre les mains de la cour d’appel du Texas – la plus haute juridiction pénale de l’état - qui devrait « normalement » statuer dans les six prochains mois.

Hank travaille très régulièrement avec ses avocats pour préparer la suite, si cet appel devait être rejeté. Les options judiciaires sont désormais très restreintes, et il faut étudier les nouvelles jurisprudences pour identifier et utiliser les failles d’un système très dysfonctionnel.

L’attente est longue, fastidieuse et l’issue reste incertaine.

Nous allons bientôt lancer une nouvelle campagne de levée de fonds car nous devons impérativement engager trois experts. Devoir financer la justice pour faire entendre la vérité est une source de stress supplémentaire qui l’inquiète particulièrement.

 

Comment évolue la situation au Texas par rapport à d’autres Etats rétentionnistes du pays ?

La situation au Texas est toujours aussi imprévisible, même si des signes positifs sont apparus depuis quelques années, l’implication politique du système judiciaire laisse toujours craindre le pire.

2019 est l’année des primaires, et tout reste suspendu aux élections des juges et des procureurs d’état.

Par ailleurs, la juridiction fédérale reste prisonnière des griffes du président des Etats-Unis, qui nomme les juges fédéraux (nommés à vie). Il a déjà pourvu plus de 65 sièges vacants, ce que n’avait pas pu faire son prédécesseur dont les nominations avaient systématiquement été bloquées et rejetées par le Congrès.

Il faut souligner que les mentalités évoluent, que le travail des médias locaux met en lumière la réalité du système judiciaire et que la nouvelle génération de procureurs semble ouvrir une nouvelle voie.

Un réel travail d’éducation reste à faire, c’est un engagement à long terme qui portera ses fruits.

Il est déjà de plus en plus difficile au Texas de composer un jury car les jurés potentiels sont de plus en plus frileux à accepter de voter pour une sentence de mort vu le nombre de condamnés à mort innocentés et libérés aux USA, ils sont aujourd’hui 165.